Le désherbage chez Grass

Le désherbage chez Grass

Grass est anglo-italienne, née au Kenya, elle a vécu en Afrique du Sud, au Zimbabwe, puis en Italie où elle a fini par apprendre la langue de son père. L’Angleterre aussi. Elle est professeur de langues. Aux 18 ans de ses enfants, elle leur offrira un billet d’avion aller simple pour le pays de leur choix. L’un vit aujourd’hui au Canada, l’autre en Italie, un en Angleterre, et Michelle en Nouvelle-Zélande. Parce que pour elle, il est essentiel de voyager.
Elle rencontre Anthony au moment où elle décidait de partir vivre en Nouvelle-Zélande rejoindre sa fille. C’est l’amour. Il décide de la suivre. Ils se marient et prennent l’avion. Pour lui, c’est le premier voyage de sa vie. Arrivés chez les kiwis, ils louent un van pour trois mois. Finalement ils trouvent tout de suite du travail chez un homme qui a un grand domaine. Plus tard, la maison de l’autre côté de la route se libère. Ils traversent.

La veille nous avons raccompagné Anne-Claire et Louis à l’aéroport. Et comme ils sont partis, le ciel a décidé d’être dans le même état que nous. C’est donc en pleine randonnée sur la baie de Stillwater que les nuages s’effondrent. Trempés et démotivés, nous arrivons chez Grass. Le soleil fait sa ré-apparition en même temps qu’elle. Et par son accueil chaleureux, enthousiaste et la découverte de notre lieu de vie pour la semaine, le moral remonte.

Grass gère un immense verger composé de pruniers, abricotiers, pommiers, poiriers, citronniers, orangers, avocatiers, framboisiers. Elle a aussi un potager, et deux serres avec des fleurs… noyées sous une herbe haute. Elle nous raconte que pour Noël, ils ont pris une semaine de vacances, et qu’en revenant les serres avaient été envahies. Elle en a pleuré. Moi qui commence à réfléchir à la suite de ma vie, rêvant de me rapprocher de la terre, ce woofing répond déjà à mes questionnements. Oui, vivre de la terre c’est difficile et exigeant.

Cette semaine, nous allons essuyer les larmes de Grass, en désherbant les deux serres, en compagnie de nos trois colocataires, Ellie (danoise), Ella et James (anglais). C’est beaucoup de travail, mais un podcast dans les oreilles et le temps passe vite. On relèvera la tête avec la satisfaction de voir notre travail réalisé, et la joie de Grass qui retrouve ses fleurs et ses framboisiers.

Notre travail ne s’arrête pas là. Nous ferons du ramassage, nettoyage, triage, empaquetage des prunes vendues sur le marché samedi ou encore sur le bord de la route. En Nouvelle-Zélande, il est très courant de trouver des cabanes en libre service, avec des fruits, légumes, miel, noix à vendre. Les gens se servent et mettent l’argent dans le « pot de l’honnêteté ». Possible en France ça ?

Mais le véritable bonheur, Grass le trouve quand elle revêt sa tenue d’apicultrice. Sa passion ? Les abeilles. Voyant notre grand intérêt pour ces petites bêtes, elle nous offre 2h de cours sur la vie et l’organisation des abeilles, puis vient la pratique. Elle nous emmène avec elle pour inspecter ses ruches. Est-ce que la reine a bien fait des œufs ? Tiens dans celle-là il n’y en a pas, problème. On va mettre une « frame » de la ruche d’à côté avec des œufs. Dans celle-ci tout va bien, bientôt du miel à récolter. Bref, un moment de plénitude pour nous trois, car tu ne dois pas faire de gestes brusques, ce qui tu conduis à un calme total, une sorte de méditation. On comprend alors pourquoi elle aime ces moments-là, elle qui coure partout non stop d’habitude.

Le samedi nous allons au marché voir le résultat de tout ce travail et de cette passion. Nous trouvons Michelle, sa fille, derrière un magnifique stand aux couleurs rouge des prunes et doré du miel. C’est un beau travail que celui qui sert à nourrir. Celui qui tente d’être le plus bio possible. Car comment faire lorsque les oiseaux et les petits vers s’en prennent à tes prunes jaunes ? Si tu traites, tu n’es plus aligné à ton éthique, mais si tu ne traites pas, c’est de l’argent que tu perds car tu n’es pas en train de t’amuser. Ces prunes te font vivre. En même temps, tu aimes trop tes abeilles pour qu’elles respirent des pesticides. Alors que faire ? Ramassez les prunes alors qu’elles ne sont pas encore mûres ? Récupérer les morceaux de prunes intactes, les découper en fines lamelles, et les assécher pour les vendre en petits sachets de fruits secs ? Grass a des idées. Elle essaie, tente, apprend et y arrive.

 

Nous nous quittons avec le regret de ne pas être restés assez longtemps. Et c’est le côté mama italienne qui ressort lorsqu’elle nous prend dans ses bras, nous sert très fort, nous embrasse puis « arrivederci, alla prossima volta ! »

Maeva

Retrouvez BEETOPIA, le projet de Grass sur leur site internet.


  • Ce reportage est plein de.. grâce (je sais, elle était facile). Avez-vous pu vous racheter un appareil photo car celles-ci sont très belles ? Comme tu le soulignes Maeva, qu’il est dur de vivre de la terre. On moque souvent les paysans qui se plaignent du temps pas assez, chaud, pas assez pluvieux, trop chaud, trop pluvieux… Et puis rester en harmonie avec ses valeurs, c’est très complexe. En tout cas, cet endroit est magnifique et Grass semble être une belle personne. Vous avez dû vous gorger des saveurs sucrées de tous ces fruits. Quant aux ruches, elles sont magnifiques.

    • Oui nous avons racheté le même appareil (modèle juste plus récent) car nous avons eu le remboursement de l’assurance. Donc ouf !
      Dans ce texte, je voulais en quelques sortes rendre hommage à ceux qui nous nourrissent. Et oui Grass est une belle rencontre. Merveilleuse, généreuse, de belles valeurs ! On l’adore !