Transports, fête et patates

Transports, fête et patates

« Yo love Jesus », « Paz con dios », Jesus el señor », « Jesus illumina mi camino » autant d’autocollants tout autour du chauffeur du collectivo dans lequel nous venons de monter. Perso, ce trajet-là, je le sens bien. Vincent s’assoit, je trouve une place à l’avant dernière rangée, au fond. Vous savez, là où vont les perturbateurs de la classe ! Une mère et sa fille m
ontent, avec leur fameux tissus péruvien accrochés dans le dos, et remplis à raz bord. Il reste une place devant moi, et une place derrière. Elles semblent dubitatives, réfléchissent, pendant que trois personnes leur hurlent en rigolant qu’il y a une place au fond. Elles finissent par poser leurs affaires au milieu du couloir et s’assoient. Une dame derrière moi, glisse entre mes jambes un gros sac.
Il reste une place dans le bus, on ne démarre pas tant que ça n’est pas plein. Pendant ce temps, dehors, une dame crie « Cono, tortillos, cono, tortillos ». Un monsieur côté fenêtre s’offre donc un « tortillo », une glace à l’eau sur un bâtonnet fait maison (donc pas d’emballage…), donnant envie à tout le monde. A l’arrière, la demoiselle demande à sa mère, devant, d’en prendre un. Tortillo que je tente de passer par le bâton pour ne pas toucher sa glace, qu’elle prend à pleine main. J’en fais bien des manières ! Une dame derrière moi me donne des sous pour que je les passe au monsieur prêt de la fenêtre pour qu’il lui prenne deux tortillos. Et voilà deux tortillos qui se passent à pleine main, de siège en siège avant d’arriver dans la bouche de la dame et son mari. Un homme avec une glacière monte à bord, proposant des « empanadas de pollo ». Arrivé au fond du bus, il se fait charrier par le petit groupe « c’est pas des empanadas qu’il faut vendre, ce sont des tortillos ! ». Il rit avec eux, et ressort du bus. Une petite fille toute timide qui n’a pas plus de dix ans, passe à son tour dans le couloir pour vendre des « gelatinas ». Elle aura du succès auprès du monsieur à ma gauche qui en prend pour lui et sa femme.
C’est alors qu’enfin le bus affiche complet car une dame monte suivie d’un couple avec un enfant. Il ne reste qu’une place. Le monsieur qui passait les glaces se lève pour laisser sa place à la femme avec l’enfant. Et soudain, sortis du fond du bus, un tabouret en plastique vert se passe de main en main pour arriver à l’avant pour le monsieur du couple qui s’installe au milieu du couloir. Et sort à nouveau du fond du bus, un seau noir, qu’on installe pour le monsieur qui a laissé sa place. Pendant le trajet il va s’endormir, tanguant fortement jusqu’à s’appuyer sur mes jambes.
Plus qu’au complet, le bus recule violemment, ce qui lui permet de démarrer le moteur… et c’est partiiiiiii ! Enfin, après 20 mètres on s’arrête pour regonfler les pneus. Et c’est vraiment parti, nous voilà à longer le lac Titicaca.

 

 

Ce merveilleux lac perché à 3800m d’altitude serait né des pleurs de Inti, le Soleil, voyant un massacre. Aujourd’hui on pourrait bien imaginer qu’il est rempli par les larmes des personnes qui ont une conscience écologique et qui voient le massacre. Titicaca a perdu quasiment tous les poissons qui y vivaient faisant des pêcheurs des agriculteurs. La pollution vient du non traitement des eaux usées atterrissant directement dans le lac ; métaux lourds, excréments et médicaments provoquent alors l’apparition d’une algue verte nocive. La grande ville bolivienne La Paz est la principale accusée car en pleine expansion, rien n’a été mis en place pour gérer les déchets. A titre d’exemple, l’ONG de la baie de Cohana ramasse 30 tonnes de déchets par semaine. L’afflux de touristes dans cette région n’aide pas. En voyant les centaines de bateaux dégager une fumée noire pour transporter les touristes d’une île à une autre tout au long de la journée, nous avons eu mal au coeur. Nous avons décider de ne pas faire d’île. Malgré la tentation d’aller découvrir les îles flottantes des Uros par exemple. Tant pis. On est déjà là, à tirer la chasse d’eau, n’en rajoutons pas. C’est pour ça que nous sommes dans ce collectivo qui nous amène à Luquina Chico où nous allons rencontrer Guido et sa famille.

 

 

Guido fait parti des trente-cinq familles qui vivent sur la presqu’île de Luquina Chico. Après avoir demandé à un monsieur où est la maison de Guido « Là-bas, tu vois, tu traverses le champs, tu suis le chemin, c’est là-bas où il y a des matériaux de construction. », nous voilà a rentré dans un jardin pleins de fleurs, un petit champs de fèves, et sur le côté une petite maison qui sera nos quartiers. Une chambre adorable avec une vue splendide sur le lac, là, juste là.

 

 

Guido et sa famille sont agriculteurs, et comme il a fait des études de tourisme, il développe un projet d’éco-tourisme rural. Du coup, à peine nos sacs posés, il nous informe que cet après-midi, la famille plante des pommes de terre, si on souhaite se joindre à eux, nous sommes les bienvenus. Pérou > patates > patates > Pérou, mais bien sûr que nous allons vous aider ! C’est quand même cool d’être dans les origines de nos frites !

 

 

Guido nous explique que chaque parcelle de terre n’accueille pas les mêmes légumes à la saison d’après. Ils font tourner pour que la terre ne se fatigue pas. Donc dans le champs où nous plantons les pommes de terre, il y avait des fèves. Il dit qu’en ce moment c’est difficile car il ne pleut pas. La terre est sèche. Je lui demande pourquoi il ne prend pas l’eau du lac. Il me répond que c’est trop compliqué sans pompe à eau. Alors il regarde le ciel, en espérant l’arrivée de la pluie. Ils sont de la culture aymara. Ils parlent d’ailleurs entre eux l’aymara. C’est un peuple qui a un profond respect des éléments. D’ailleurs Guido nous cite tous les noms des vents sur le lac. Le deuxième soir, il nous invite à une démonstration de danse traditionnelle – nous aurons même droit aux costumes – danse qui permet de remercier les éléments qui leur a permis une bonne récolte.

 

 

Le lendemain matin, Guido nous propose une sortie sur le lac. Il sort une barque pour lui. Un kayak pour moi, et un objet flottant presque pas identifié pour Vincent. C’est donc avec nos petits corps musclés que nous flottons sur le lac.

 

 

Nous repartons de Luquina Chico avec un splendide lever de soleil pour cette dernière journée au Pérou. Nous retournons à Puno récupérer nos gros sacs avant de prendre le bus vers la Bolivie. Mais comme à Puno il se passe toujours quelque chose, nous tombons sur le carnaval des universités ! C’est donc avec pleins de paillettes, de déguisements et de sourires que nous quittons le Pérou.

 

 

Maeva


  • Génial la ballade en bus!! J’étais avec vous (vous ne m’avez pas vu ?) en train de passer les tortillos et puis surtout le tabouret et le seau noir (pourquoi un seau ? L’histoire ne le dit pas). J’imagine Maeva avec la tête du passager sur ses genoux, le sac de la dame entre les jambes… A mourir de rire!! Et puis pour rire il y a aussi vos costumes traditionnels. Autant pour Vincent, çà va (tout lui va d’ailleurs avec sa taille mannequin…), autant pour Maeva c’est du délire!!! Les ponpons et le chapeau étroit: c’est TOP ma fille…
    Pour le Lac Titicaca je vous avais dit que c’était une catastrophe. J’avais vu un reportage il y a quelques semaines qui dénonçait justement sa disparition pur et simple du fait de la pollution. Je le trouve d’ailleurs peu attirant. J’imaginais un lac au milieu de montagnes immenses et vos photos donnent presque l’impression d’un lac de plaine.
    Je vois aussi que l’agriculture reste archaïque (labourage avec des bœufs). En même temps il n’y a pas plus écolo car cela laisse respirer la terre contrairement aux tracteurs qui la tassent et la tuent. Il faut juste ne pas avoir de trop grandes surfaces.
    Et puis le clou de cet article reste quand même le vélo/pédalo/kayak de Vincent avec marche avant ET marche arrière. Je veux le même!! Et puis çà à l’air d’aller vraiment vite.
    Que dire enfin de toutes ces couleurs, ces visages apaisés et souriants, si ce n’est qu’ils font du bien et apportent de la fraicheur.
    Un mot encore : la péruvienne est trapue (sûrement l’altitude) et plutôt ronde, mais très belle.
    Bonne route en Bolivie…