Douceur colombienne et tourisme

Douceur colombienne et tourisme

À première vue – no gracias – la Colombie ne devrait pas nous décevoir. Notre arrivée à Cartagena – no gracias – nous donne un premier aperçu très coloré, avec tout comme on aime – no gracias. Des vendeurs de fruits exotiques qui te les découpent pour que tu les grignotes et des limonadas à chaque coin de rue. Des restaurants – no gracias – avec des chaises en plastique et une décoration mettant une image divine à côté de la peinture d’une femme allongée nue – no gracias. Tu y manges de délicieux sancocho pescado ou arroz con pollo. Et surtout, on a enfin retrouvé le plaisir de boire un bon café.

 

 

Le soir c’est la véritable ambiance latine – no gracias – où la vie est dans la rue. Les gens viennent s’assoir sur la place de la Trinidad pour papoter. Certains mangent un empanadas pendant que d’autres font la queue chez le petit marchand de burger qui a monté sa véritable entreprise sur quatre roues. Plusieurs ont une glacière en polystyrène à bandoulière et viennent te proposer une cerveza (la bière) – no gracias – alors que l’alcool est interdit car on est un dimanche d’élection. D’autres s’adonnent à de très concentrées parties d’échecs et de dames. Les regards sont imperturbables autant chez les joueurs que chez les spectateurs.

 

 

Plus loin dans le rue, les dominos claquent sur la table. Le style donne de la profondeur au jeu. Petite, je faisais des parties avec mon papi espagnol. Et je n’y trouvais pas de grands enjeux. Nous avons tenté avec Vincent, mais trois parties plus tard, nous nous ennuyions déjà. Quelque chose doit nous échapper. No Gracias.

 

 

No gracias je ne souhaite pas de chapeaux, ni de lunettes de soleil puisque j’en porte actuellement. Je ne veux pas d’émeraudes, ni de tour organisé à la playa blanca où tous les touristes blancs sont côte à côte pour foutre leur cul blanc sur le sable blanc afin de devenir rouge. Parce que le problème quand tu es touriste, c’est que parfois tu vas dans des endroits touristiques. Tu en es évidemment la cause. Et le lieu touristique souhaite te cloisonner dans un espace maitrisé. Cet espace a été créé exprès pour toi qui voyage, mais sans trop te dépayser. De l’exotisme mais pas trop. Donc pour ne pas effrayer tes papilles, on te proposera burgers et pizzas. On t’offrira un bus qui viendra te chercher aux pieds de ton hôtel pour t’amener à un bateau qui t’emmènera sur une belle plage de carte postale. Tout le monde prendra la même photo en essayant d’éviter la tête de l’allemand, et le parasol de la française. Et tout ce beau monde désertera la mer à la même heure pour le retour. No gracias.
No gracias parce que ce n’est pas le tourisme que je recherche, et je ne suis pas non plus un portefeuille ambulant. D’autant que notre budget n’est pas le même que si on ne venait que trois semaines. Mais je me vois mal dire au jeune homme qui tente de me vendre un bonbon pour survivre : « Tu vois, je n’ai pas beaucoup d’argent, je fais un tour du monde. »
Ça sonne mal, non ?
C’est ma question récurrente depuis le début du voyage. Être touriste sans trop l’être. Quel impact je laisse parce que finalement c’est par ma présence que ce gars tente de me vendre son truc, mais en même temps, cela lui permet de vivre. Bref, je n’ai pas fini de me tourmenter sur l’éthique !
Et puis sortir des sentiers battus n’est pas chose aisée. Ça demande de la perte de temps, de la patience et beaucoup d’énergie.

 

 

C’est comme ça que tu marches, à la nuit tombée 3,6 km, au bord d’une route où beaucoup de camions et voitures passent très vite, alors que l’orage commence à gronder. Bon début pour un film d’horreur. Mais il n’en est rien. On est bien rentré à la guest house après avoir fait une plage magnifique et quasi déserte MAIS payante. Certes nous avons un bon pouvoir d’achat en Colombie, mais payer pour aller sur une plage, je ne comprendrais jamais je crois. La nature est à tout le monde, pourquoi vouloir gagner de l’argent sur son dos.

 

 

Pour le lendemain nous avions acheté sur internet deux entrées pour le parc naturel de Tayrona. L’accès est limité à 6000 personnes par jour. Alors pour une fois nous avons été prévoyant car même s’il est payant, c’est apparemment un incontournable. Mais notre sang n’a fait qu’un tour quand, à la caisse, la dame nous demande de payer une assurance. Elle est obligatoire. Vincent, dans son espagnol bancal proteste, expliquant que nous sommes déjà bien assurés. Par notre carte bleue de voyageur avec laquelle nous avons payé les billets et par notre assurance tour du monde. Papiers que nous lui avons montré. Rien n’y fait. Soit on payait, soit on partait en perdant les deux entrées (chères pour la Colombie d’ailleurs). Alors on a rallongé la note.

Après le contrôle, un minibus attend pour faire monter tout le monde. Il est payant… Le chauffeur nous dit de monter. No gracias. Il nous dit sur un ton peu aimable : « Mais il y a une heure de marche ! » « Parfait, on adore marcher ! ». C’était sans compter des crampes d’estomac qui ont plié en deux Vincent tous les 300 mètres. Je lui ai dit qu’il choisissait bien son moment parce qu’on pourrait ainsi profiter de nos trois assurances. Comme c’est un costaud mon chéri, on a plutôt profité de la plage idyllique

 

 

Et après une grosse sieste il était presque d’attaque pour la balade dans la mangrove à la recherche des caïmans. Ben oui, si on se faisait manger un bras, les assurances auraient été utiles. Mais on n’a pas réussi. Alors on a pris le minibus au retour, parce que là Vincent était vraiment mal.
Mais après 12h de sommeil, finalement il n’est pas mort.

 

 

Pour notre troisième journée dans le coin, nous avons profité des hamacs de notre guest house et demandé à Sandra qui y travaille, quel endroit elle affectionnait ? « La playa Los Cocos ! » « Bale ! ». Nous voici montés sur deux moto-taxi, cheveux au vent, dans cette direction. À peine 5 minutes plus tard, les conducteurs s’arrêtent et nous indiquent un minuscule passage entre les deux maisons là-bas. Et c’est à travers les cocotiers que nous arrivons sur une plage digne des cartes postales. Des cocotiers, humidifiés par la brise salée qu’envoient les grosses vagues, bordent toute la plage déserte. C’est somptueux. Et comme cette plage est gratuite, nous nous offrons deux limonadas citron coco. Les meilleures qu’on ait bu jusqu’à maintenant.

 

 

Nous rentrerons à la guest house avec un cuisinier tout jeune qui nous a préparé un repas vraiment très bon avec un riz à la coco, un poisson dans un bouillon à base de coriandre et une petite salade de légumes coupés très fin et marinés dans du citron, des oignons et de la coriandre. Bref, la Colombie nous l’aimons déjà !

 

Maeva

 


  • J’ai beaucoup aimé ce nouvel article, quoiqu’il me laisse un peu d’amertume. On sent toujours dans ton écrit cet humour que j’affectionne et en même temps ce questionnement (louable et légitime), cette approche philosophique et éthique de votre voyage qui pourrait à terme vous aigrir… Faites attention à ce risque. Vous savez que le monde est fait de blanc et de noir ce qui le rend gris, dans toutes les nuances possibles…. Et vous le constatez d’autant plus en Colombie. Oui il y a du tourisme « de masse ». et oui les gens en ont besoin pour vivre. Et oui vous vous retrouvez un peu coincés entre deux approches du voyage et avec vos « têtes de touristes » on peut vous prendre pour des planches à billets. Bronzez que diable pour avoir l’impression d’être un peu autochtone!!!!!
    J’ai adoré la photo du tag de l’oiseau… Tout simplement magique et toutes les couleurs de ces rues, c’est vraiment rafraichissant.. Mais j’imagine que vous nous montrez le côté plus touristique ? Non ? … je vous taquine…